A une époque, s’installer comme dentiste libéral répondait autant à une vocation qu’à une « ambition sociale ». Cette époque est désormais révolue, et comme tous les autres professionnels de santé, les chirurgiens-dentistes connaissent une nouvelle tendance en forte progression : le salariat.
Devenir dentiste libéral, une vocation et une ambition
L’univers de la santé se transforme depuis de nombreuses années, et ces évolutions impactent tous les professionnels, depuis les chirurgiens-dentistes jusqu’aux infirmières, en passant bien évidemment par les médecins généralistes ou spécialistes. Traditionnellement, un étudiant suivant une formation dans une université d’odontologie, se destinait, dans la grande majorité des cas, à devenir dentiste libéral, que ce soit en reprenant la succession du cabinet dentaire familial ou en créant son propre cabinet. Bien qu’il s’agissait aussi de répondre à une véritable vocation (soigner les patients), devenir dentiste libéral comme devenir médecin représentait aussi une « ambition sociale ». Les professionnels de santé étaient alors considérés comme des marqueurs clés de la réussite sociale. On devenait souvent dentiste de père en fils, et les cabinets médicaux restaient gérés par la même famille pendant des générations.
Cette approche traditionnelle a depuis longtemps été remise en cause, et aujourd’hui, les professionnels de santé nouvellement arrivés ne nourrissent plus les mêmes ambitions ni ne sont guidés par les mêmes aspirations. La vocation reste toujours au centre des projets. Mais devenir dentiste ne signifie plus nécessairement de s’installer en tant que chirurgien-dentiste libéral, et ouvrir un cabinet de médecine ne concrétise plus automatiquement les ambitions des jeunes médecins.
Des nouvelles aspirations pour les chirurgiens-dentistes et les professionnels de santé
Il est impossible de lister de manière exhaustive toutes les causes de cette profonde mutation. En revanche, on peut souligner que les politiques des autorités sanitaires y ont grandement participé. La Santé publique est désormais pensée comme une convergence de tous les professionnels. Maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), centres dentaires ou ophtalmologiques, Hôpitaux de proximité, … la réforme du système de santé en France passera nécessairement par la redéfinition du rôle central des patients. Ainsi, lors de la présentation du projet de réforme Ma Santé 2022, le président de la République, Emmanuel Macron, donnait le ton en déclarant : « Je veux que l’exercice isolé devienne une aberration ». Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, confortait cette orientation :
« L’exercice isolé doit devenir l’exception d’ici à 2022 »
Agnès Buzyn, Ministre de la Santé
Dans le même temps, les futurs chirurgiens-dentistes, eux-mêmes, aspirent à de nouvelles ambitions, notamment en ce qui concerne le meilleur équilibre entre vie privé et vie professionnelle. Les avantages du salariat (congés payés, assurance maladie, …) ne sont plus considérés comme des injures par les professionnels de santé, longtemps contraints de devenir également patrons.
Les dentistes de demain, des chirurgiens-dentistes salariés ?
Dans une tribune publiée dans les colonnes du journal Le Monde, le spécialiste de la santé, M. Yves Hochard, détaillait les conséquences de cette convergence des phénomènes : d’un côté, l’ambition publique d’un système de santé plus efficient et moins solitaire, de l’autre, l’aspiration à un « meilleur confort de vie » de la part des professionnels de santé eux-mêmes.
Ainsi, il soulignait que 62 % des médecins nouvellement inscrits à l’Ordre avaient choisi le salariat contre 12 % seulement pour l’exercice libéral exclusif. Une tendance confirmée par les analyses détaillées et chiffrées de la Dress (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques). En soulignant la multiplication des centres de santé mais aussi les ambitions portées par le gouvernement de renforcer l’exercice partagé (Réforme Ma Santé 2022), M. Hochard dressait ainsi un constat pour les médecins d’aujourd’hui, applicable en tout point aux dentistes :
« Le praticien se concentre uniquement sur son métier, sans se soucier de la gestion de l’entreprise. »
M. Hochard
Certes, la tendance n’en est qu’à ses prémices, mais elle devrait perdurer et même se renforcer dans les années à venir. De nombreux débats agitent encore le monde des acteurs de la santé, débats relancés avec la crise sanitaire que nous traversons actuellement, et qui a mis en lumière des carences de notre système de soins.
Et vous, considérez-vous que le salariat pour les dentistes et plus généralement pour les professionnels de santé est une tendance durable, inscrite à se généraliser ? Quelle autre grande transformation pensez-vous voir apparaître à moyen ou long terme ?
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La pratique en salarié? Pourquoi pas à partir du moment où l’on est bien payé et sure d’être payé.
En salariat, dés que l’on ferme la porte le soir, on oublie les soucis.
En cabinet dentaire privé, on les conserve. Par contre on travail en « patron » pour soi comme on a envi.