Les chirurgiens-dentistes connaissent précisément la situation « critique » de notre système de santé. Pas une semaine ne se passe sans que la désertification médicale soit évoquée, sans que la pénurie de soignants ne soit dénoncée, sans qu’un fait divers rappelle l’ »insécurité croissante des professionnels de santé », … A ces difficultés structurelles – ces débats font l’objet de concertations depuis de nombreuses années – s’ajoutent des difficultés plus spécifiques sur chaque territoire de l’Hexagone.
Les dentistes libéraux excédés de ne pas être entendus
Force est de constater, que la santé orale des Françaises et des Français implique majoritairement les chirurgiens-dentistes libéraux. 85 % de la population reste fidèle aux cabinets et aux centres dentaires, et les offres de soins bucco-dentaires à l’hôpital représentent toujours une exception. Si aujourd’hui, le constat est partagé par tous les acteurs concernés, cela n’a pas toujours été le cas. On se souvient du numerus clausus et de la gestion arithmétique du nombre de chirurgiens-dentistes. On édulcore en revanche les changements de mentalité chez les jeunes diplômés en odontologie, des mentalités qui entraînent des conséquences directes sur l’offre de soins. C’est ce qu’expliquait aux journalistes du Petit Courrier, Samuel Guérin, le président de l’Ordre des Chirurgiens-dentistes de la Sarthe : « Il faut aussi savoir que les jeunes dentistes ne travaillent plus comme leurs aînés. Ceux qui arrivent à la retraite travaillent en moyenne 45 à 55 heures par semaine mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas chez les jeunes. Il faudrait environ deux chirurgiens-dentistes qui s’installent pour un départ en retraite, car le travail n’est plus quelque chose de central pour les jeunes. »
Cela renforce les difficultés à pouvoir répondre aux attentes des patientes et des patients, ce qui peut conduire à une forme d’exaspération, de colère de ces derniers. Dans ces conditions, il est compréhensible de constater une augmentation des incivilités voire des actes de violence (verbale ou physique) au cabinet dentaire. Cette incapacité à répondre correctement aux besoins des patients contribue à « nourrir » cette violence du quotidien, qui devient intolérable pour une grande partie des soignants, dont les chirurgiens-dentistes.
Une réponse globale pour l’avenir de la santé bucco-dentaire
Ce sont l’ensemble de ces problématiques, que l’URPS Chirurgiens-Dentistes d’Auvergne Rhône Alpes a souhaité mettre en avant en publiant une lettre ouverte au ministre de la Santé, Yannick Neuder. Le courrier s’appuie sur une récente étude (réalisée à la fin de l’année 2024), mettant en lumière une « une profession fragilisée » et « une situation préoccupante ». La question de la démographie des chirurgiens-dentistes n’est pas la seule problématique conduisant l’URPS à « tirer le signal d’alarme ».
Éric Lenfant, président de l’URPS, alerte ainsi sur cette profession « qui ne parle pas beaucoup, mais n’échappe pas à l’épuisement professionnel ». L’attractivité économique de l’exercice libéral n’est plus aujourd’hui suffisante pour satisfaire aux attentes des étudiantes et étudiants actuels. D’autant plus, que près de 9 chirurgiens-dentistes sur 10 (87 %) estiment que la priorité absolue doit se concentrer sur l’allégement des tâches administratives. Au-delà de cet allègement demandé par les chirurgiens-dentistes libéraux, ces professionnels de santé soulignent également les difficultés qu’ils rencontrent s’agissant du recrutement de collaborateurs et collaboratrices (assistants dentaires, secrétaires médicales, …) Ainsi, si 65 % des chirurgiens-dentistes admettent rencontrer ce type de problème, ils sont 8 sur 10 à ressentir ces difficultés s’agissant de la recherche d’un collaborateur ou d’un remplaçant.
Ce sont toutes ces problématiques, qui doivent trouver des réponses pertinentes et adaptées, pour éviter le pire. En Auvergne Rhône Alpes, 76 % des dentistes libéraux interrogés qualifient ainsi la profession d’épuisante, quand 70 % la qualifie d’»anxiogène ». Un malaise, qui participe à nuire à l’attractivité de la profession, quand la France éprouve un tel besoin de chirurgiens-dentistes.
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