Les dérives sectaires dans le domaine de la santé se multiplient à un rythme encore plus soutenu depuis le début de la crise sanitaire. Les chirurgiens-dentistes comme les autres soignants ont-ils un rôle à jouer pour lutter contre ces dérives ?
La santé et la santé bucco-dentaire, des terreaux favorables aux dérives sectaires …
Pour les chirurgiens-dentistes libéraux ou salariés, comme plus généralement pour l’ensemble des soignants, 2022 aura marqué un retour à la quasi-normale, qui devrait se confirmer en 2023. C’est le moment de tirer les enseignements des années de crise, que le pays vient de traverser. Certains de ceux-ci sont étonnants, comme ceux que dresse le rapport de la mission interministérielle de vigilance et de luttes contre les dérives sectaires (Miviludes) pour l’année 2021. En novembre dernier, la Miviludes appelait les chirurgiens-dentistes, les médecins et tous les soignants à la plus grande vigilance face à l’explosion des dérives sectaires dans le domaine de la santé. Plus du quart des 4020 saisines reçues en 2021 concernait spécifiquement le domaine de la santé. Ces dérives sectaires liées aux soins ne sont pas nouvelles, mais elles connaissent une augmentation conséquente depuis le début de la crise sanitaire avec une augmentation des saisines de 86 % depuis 2015.
Dans son introduction, le rapport confirme le lien existant entre cette augmentation conséquente des dérives sectaires et l’émergence de la crise sanitaire du coronavirus. « « La crise sanitaire, inédite par son ampleur, a favorisé l’émergence de nouvelles mouvances et d’individus souhaitant tirer profit des personnes isolées, malades ou en perte de repères. ».
La remise en cause de la science, un danger pour la santé publique ?
En effet, l’apparition du coronavirus a créé les conditions pour une vaste remise en cause des connaissances et de l’approche scientifique. Les mouvements anti-vaccin n’en représentent qu’un exemple parmi tant d’autres, bien qu’ils soient parmi les dangers les plus visibles. Cette remise en cause a notamment permis la multiplication (dangereuse) des « pseudo-guérisseurs », dont une partie des « soins » consiste à rejeter toute approche conventionnelle. Outre les dangers que cela peut représenter pour les patientes et les patients, cette multiplication des approches sectaires a des conséquences lourdes et durables pour la santé publique. Bien qu’en réaffirmant que toutes les pratiques non conventionnelles dans le domaine de la santé ne relèvent pas de dérives sectaires, la Miviludes alerte sur le danger que cela représente. Dans son rapport, l’organisation interministérielle souligne avoir signé des partenariats avec de nombreux ordres professionnels, dont celui des chirurgiens-dentistes.
Au-delà de ce constat alarmant, la Miviludes souligne qu’une des causes de ces dérives est à rechercher dans la distanciation de plus en plus grande entre les soignants et les patients. Elle souligne ainsi : « La désertification médicale des campagnes françaises n’est pas étrangère à ce phénomène (de thérapies non conventionnelles) qui prend des proportions inquiétantes et contribue à créer une insécurité sanitaire ». Les chirurgiens-dentistes comme les médecins sont aujourd’hui moins nombreux pour informer, éclairer et accompagner les patients dans leurs choix, laissant la place libre à des « dérapeutes » comme les qualifie le rapport. Les professionnels de santé sont donc appelés non seulement à signaler toute constatation de telles dérives mais aussi à mieux prendre en compte leur rôle d’information auprès de patients, perdus face à un flot ininterrompu d’annonces en tout genre.
Estimez-vous que les chirurgiens-dentistes comme les autres soignants soient en partie responsable de ce manque d’informations et d’éclairage des patients ? Comment estimez-vous pouvoir lutter efficacement contre la multiplication de ces dérives sectaires ?
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